Le nouveau droit des sûretés dont le périmètre et les modalités ont été remaniés par l’ordonnance n°2021-1193 du 15 septembre 2021 est entré dans le domaine des restructurations d’entreprises dans le but de remettre à jour un équilibre entre le droit des créanciers et la nécessaire protection du débiteur et de son garant en vue de la protection de l’entreprise.
Cette confrontation n’est pas récente mais le tournant législatif découlant de l’ordonnance vient recréer un certain équilibre entre la poursuite et la réservation de l’entreprise et les droits et privilèges des créanciers sur cette même entreprise ainsi que sur les garants de l’entreprise.
D’un côté, on va donner aux créanciers de nouvelles prérogatives et plus de pouvoirs pour favoriser l’adoption d’un plan de sauvetage de l’entreprise et de l’autre, on va classer les garanties réelles consenties en faveur des créanciers au travers du mécanisme dit des « classes de partie affectée ».
Mais préserver les intérêts contradictoires et opposés de tous s’avère un exercice bien difficile.
L’ordonnance précitée, qui est entrée en vigueur le 1er octobre 2021, n’a pas impacté les procédures en cours.
Qu’en est-il des sûretés consenties dans le cadre de la conciliation ?
Un arrêt du 25 septembre 2019 de la Cour de cassation a définitivement mis le feu au poudre en sonnant le glas de l’article L 611-12 du code de commerce qui prévoyait :
« l’ouverture d’une procédure de sauvegarde, de redressement judiciaire ou de liquidation judiciaire met fin de plein droit à l’accord constaté ou homologué en application de l’article L 611-8. En ce cas, les créanciers recouvrent l’intégralité de leurs créances et sûretés, déduction faite des sommes perçues, sans préjudice des dispositions prévues à l’article L 611-11 ».
Le texte, alors intact de l’époque, laissait penser que l’effet rétroactif de la remise en cause de l’accord de conciliation suite à l’ouverture d’une procédure collective était limité ; les sûretés consenties pour garantir l’exécution de l’accord devait normalement subsister pensait-on.
L’arrêt de la Cour de cassation du 25 septembre 2019 en a décidé autrement en indiquant :
« le créancier ne conserve pas le bénéfice des nouvelles sûretés obtenues dans le cadre de l’accord ».
Cela semblait signifier légitimement que les créanciers qui avaient obtenu dans le cadre de la conciliation des garanties se voyaient dans la probabilité presque certaine de voir dénuer de tout effet ces garanties par l’ouverture d’une procédure collective.
Or, il était nécessaire de protéger les sûretés consenties notamment lorsqu’elles étaient consenties en contrepartie de délais de paiement ou d’abandon de créances de la part des créanciers.
C’est ce que va tenter de faire l’ordonnance n° 2021-1193.
L’ordonnance, en effet, introduit l’article L 611-10-4 du code de commerce qui dispose que :
« La caducité ou la résolution de l’accord amiable ne prive pas d’effets les clauses dont l’objet est d’en organiser les conséquences ».
Si cet article intégré au code de commerce ne vise pas à proprement parler les seules sûretés, ce texte permet d’organiser une protection de ces mêmes sûretés consenties dans le cadre de la conciliation.
En effet, c’est sur ce texte que peut s’appuyer le maintien de l’efficacité des stipulations contenues dans les sûretés qui ne seront donc pas remises en cause du fait de la caducité de l’accord.
Toutefois, pour permettre l’efficacité de cet article, il faudra que dans l’accord contractuel qui aura présidé à la conclusion de la sûreté la caducité de l’accord ait été contractuellement prévue. A défaut de telles dispositions contractuelles, on retomberait dans la situation juridique antérieure à l’ordonnance.